Pensionnats autochtones
Les enfants de Kitigan Zibi Anishinabeg n’ont pas été épargnés
Les Anichinabés n’ont pas échappé au système des pensionnats autochtones, que la fosse commune de Kamloops a brutalement remis sous les feux de l’actualité. Entre 1927 et 1960, une centaine d’enfants de Kitigan Zibi ont été envoyés dans de tels établissements, aussi loin qu’à Spanish, sur les rives du Lac Huron en Ontario.
Jusqu’à cette terrible découverte en Colombie-Britannique, beaucoup de Canadiens ignoraient encore en 2021 ce chapitre de l’histoire canadienne. Pourtant, après avoir sillonné le Canada pendant six ans et entendu 6 000 témoins, la Commission de vérité et réconciliation avait remis un rapport assorti de 94 recommandations en 2015.
La commission avait statué à l’époque que le Canada avait bel et bien commis un génocide culturel envers les Premières Nations. Les pensionnats étaient une pièce maitresse de cette politique mise en place avec la bénédiction du 1er premier ministre du Canada, sir John A. Macdonald. Sur une période de plus de 100 ans, près de 150 000 enfants des Premières Nations, Métis et Inuits ont fréquenté les 139 pensionnats répertoriés au Canada.
« Pendant plus d’un siècle, les objectifs centraux de la politique indienne du Canada étaient les suivants: éliminer les gouvernements autochtones, ignorer les droits des Autochtones, mettre fin aux traités conclus et, au moyen d’un processus d’assimilation, faire en sorte que les peuples autochtones cessent d’exister en tant qu’entités légales, sociales, culturelles, religieuses et raciales au Canada », rappelle le rapport final de la commission.
Morts dans l’oubli
Dès 2015, la commission appelait le gouvernement fédéral à mettre à jour le registre national des élèves décédés dans les pensionnats, d’identifier les lieux de sépulture et à fournir de l’information aux familles concernées.
« Au cours des travaux de la Commission, de nombreux témoins autochtones nous ont parlé des enfants qui ne sont jamais revenus du pensionnat. Les familles et les communautés ont été hantées par le sort de leurs proches et l’ignorance de leur lieu de sépulture. » – Commission de vérité et réconciliation, 2015
« Tout au long de l’histoire des pensionnats au Canada, aucun effort n’a été fait pour enregistrer, dans l’ensemble du système, le nombre d’enfants qui sont morts chaque année alors qu’ils fréquentaient des pensionnats », soulignait la commission.
Une analyse effectuée en 2015 a révélé qu’il y a eu au moins 3 201 décès d’enfants autochtones dans les pensionnats entre 1867 et 2000. La plupart seraient survenus avant 1940, mais le taux de mortalité est resté élevé jusque dans les années 1950.
Dans 50% des cas, la cause du décès n’est pas expliquée. Pour les autres, beaucoup sont morts de la tuberculose, de la grippe, de pneumonie et d’autres maladies pulmonaires.
Difficile de les retracer tous, puisque comme le mentionne la Commission de vérité et réconciliation, « tout au long de l’histoire de ce système, les enfants qui mouraient à l’école étaient inhumés dans le cimetière attenant ou dans celui de la paroisse, et leurs tombes étaient souvent à peine indiquées. Dans de nombreux cas, la fermeture des écoles a mené à l’abandon de ces cimetières ».
L’ombre de Spanish
Dans le livre Since Time Immemorial: Our Story. The Story of the Kitigan Zibi Anishinabeg, l’auteur Stephen McGregor rappelle que des enfants de Kitigan Zibi ont été envoyés dans les pensionnats de Kenora et Spanish, en Ontario, et dans ceux d’Amos et de Pointe-Bleue, au Québec.
Spanish semble avoir particulièrement marqué les corps et les esprits. L’auteur raconte: « Comme dans tous les pensionnats autochtones à travers le Canada, parler les langues des Premières Nations était interdit. Mais au pensionnat de Spanish, la punition physique était utilisée comme un outil de conditionnement afin que les enfants cessent de parler leur langue maternelle et adoptent l’anglais, le langage de leurs oppresseurs coloniaux qui les avaient envoyés ici ».
La plupart de ces enfants sont revenus changés à jamais d’après M. McGregor. « Certains ont perdu leur langue et d’autres ne furent plus à l’aise de se retrouver dans la même pièce que leurs parents. D’autres sont morts en pensant qu’ils étaient les pires êtres humains au monde. Certains n’ont jamais trouvé l’amour. »
Les séquelles liées aux pensionnats autochtones
Aujourd’hui encore, l’effet des pensionnats autochtones se fait sentir. « Les séquelles laissées par les pensionnats et les politiques et mécanismes de nature juridique et politique qui marquent leur histoire sont toujours d’actualité », notait en 2015 la Commission de vérité et réconciliation.
On parle notamment des importantes disparités entre Autochtones et non autochtones à divers niveaux (éducation, santé, revenu …), mais aussi du racisme et des discriminations systémiques dont les Autochtones peuvent faire l’objet.
La surreprésentation d’Autochtones en milieu carcéral et d’enfants autochtones pris en charge par les agences de protection de l’enfance est aussi en partie attribuable au système des pensionnats.
Les proches des survivants n’ont pas non plus été épargnés, selon la commission: « Les enfants qui ont été victimes de mauvais traitements dans les pensionnats ont parfois tendance à maltraiter les autres ».
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