Michel Prévost, D.U., président de la Société d’histoire de l’Outaouais
CHRONIQUE │ L’église L’Assomption : la doyenne de lieux de culte de Maniwaki
L’église L’Assomption-de-la-Bienheureuse-Vierge-Marie est construite entre 1868 et 1871 sur un promontoire où elle domine la communauté naissance. En fait, cette imposante église en pierres s’avère la doyenne des lieux de culte de Maniwaki. Pourtant, l’édifice ne dispose d’aucune protection pour les générations à venir, car le conseil municipal a refusé récemment une demande de la Fabrique de la paroisse L’Assomption-de-Marie pour qu’elle soit citée immeuble patrimonial. Qui plus est, une citation lui aurait permis de recevoir une aide financière du Conseil du patrimoine religieux du Québec pour changer la maçonnerie et les vitraux.
C’est au dynamique père oblat Régis Déléage, une des figures marquantes de la Vallée-de-la-Gatineau, que l’on doit la construction d’une première église catholique à Maniwaki.
Victor Bourgeau, un architecte prolifique
Pour dessiner les plans de la nouvelle église, la paroisse fait appel au prolifique Victor Bourgeau (1809-1888). Ce dernier apprend tôt à travailler le bois dans l’atelier de son père et poursuit son apprentissage auprès de son oncle, qui porte le même nom que lui. En somme, le jeune Bourgeau bénéficie d’un savoir-faire hérité d’une longue tradition familiale de charpentiers.
Par la suite, il est sans doute formé par John Ostell (1842-1902), un des architectes les plus influents du Québec, au milieu du 19e siècle. Ostell est même considéré comme le plus important architecte de Montréal de 1836 à 1859. Selon le Répertoire du patrimoine culturel du Québec : « c’est cette éducation pratique qui expliquerait la qualité de ses réalisations, tant sur le plan de la technique que sur celui de l’esthétique architecturale, qui font de Bourgeau l’un des architectes les plus importants du Québec. »
Bourgeau doit aussi sa renommée à l’estime de l’évêque de Montréal, Mgr Ignace Bourget. En 1851, l’évêque le nomme l’architecte attitré du diocèse de Montréal. On lui doit quelque 200 bâtiments aux influences stylistiques assez variées. Sa première réalisation, l’église Saint-Pierre-Apôtre, est si appréciée que le prélat le nomme conseiller de l’évêché en architecture.
Au début, Bourgeau exécute surtout des ornements d’église et du mobilier religieux, mais devient rapidement le concepteur de nombreux lieux de culte de prestige, notamment la cathédrale Saint-Germain, à Rimouski et la grandiose cathédrale Marie-Reine-du-Monde, à Montréal. Il réalise également le décor intérieur de la superbe basilique Notre-Dame, dans la Métropole.
À la fin des années 1860, Bourgeau s’associe avec le sculpteur Étienne-Alcibiade Leprohon (1842-1902) pour dessiner les plans de plusieurs églises dans la grande région de Montréal et dans Lanaudière.
En plus de faire appel à l’un des plus grands architectes de bâtiments religieux du Québec dans la deuxième moitié du 19e siècle, la paroisse de L’Assomption fait installer, en 1898, un orgue fabriqué par les facteurs de réputation internationale, Casavant et Frères, de Saint-Hyacinthe, au Québec.
Réfections majeures
En 1958, la paroisse entreprend des travaux d’agrandissements majeurs selon les plans de l’architecte Auguste Martineau (1907-1985). Cet architecte, aussi prolifique, concentre, dans les années 1940 et 1950, ses activités dans l’archidiocèse d’Ottawa, qui englobe jusqu’en 1963, l’Est ontarien et l’Outaouais. On doit à Martineau les plans de plusieurs églises modernes dans la banlieue d’Ottawa, en Outaouais, à Rouyn-Noranda et à Joliette.
À la même période, une sacristie et un chemin couvert sont ajoutés. Malheureusement, on procède à une réfection totale de l’intérieur qui perd alors tout son cachet d’origine.
L’année suivante, une statue de l’Assomption conçue par la Maison Petrucci et Carli, de Montréal, est installée dans la niche. Enfin, en 1965, quatre cloches fabriquées par la Maison Paccard, une illustre entreprise fondée en 1796 en Haute-Savoie, en France, sont installées dans le haut cocher.
Somme toute, malgré les transformations majeures effectuées sur le bâtiment religieux dans les années 1950, l’imposante église de L’Assomption-de-la-Bienheureuse-Vierge-Marie demeure un bâtiment historique et patrimonial important pour la Vallée-de-la-Gatineau. Par ailleurs, sa situation en hauteur s’avère un phare pour Maniwaki et sa valeur paysagère demeure inestimable. En effet, que serait Maniwaki sans cette église iconique située sur le même site depuis plus de 150 ans.
Espérons que le conseil municipal de Maniwaki reviendra sur sa décision de ne pas la citer en vertu de la Loi sur le patrimoine culturel du Québec. Il faut parfois croire au miracle.
Sources
L’église L’Assomption, Inventaire des lieux de culte
Victor Bourgeau, Répertoire du patrimoine culturel du Québec
Auguste Martineau, Répertoire du patrimoine culturel du Québec
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