Chronique historique
La tradition de la bûche de Noël: du bois à la pâte
Michel Prévost, D.U., Société d’histoire de l’Outaouais
Dans mon enfance, au début des années 1960, au milieu du mois de décembre, ma mère Lucille déposait, au centre de la table, une belle bûche de bouleau blanc décorée de deux chandelles. L’apparition de cette bûche en bois annonçait que Noël approchait à grands pas. En la regardant avec émerveillement et en pensant aux cadeaux à venir, j’étais bien loin de me douter que cette tradition de la bûche de Noël trouve ses origines centenaires en France.
En effet, la tradition de la bûche de Noël remonte à des siècles et jusqu’à assez récemment, elle n’avait aucun rapport avec la belle pâtisserie décorée en forme de bûche que l’on mange avec tant de plaisir aujourd’hui.
En fait, cette coutume a ses racines au XIIe siècle en Europe, particulièrement en France et en Italie. Au XVIIe et au XXIIIe siècle, les Français amènent en Nouvelle-France cette tradition qui se perpétue au Canada français jusqu’au dernier quart du XIXe siècle.
Les rituels
Au fil du temps, on voit plusieurs rituels liés à la bûche. Ainsi, à la veille de Noël, on va chercher une énorme bûche de bois franc, appelée bûche de Noël, que l’on rapporte à la maison. Le soir de Noël, le maître de la maison la place dans l’âtre, arrose le tronc d’huile, de sel et de vin, et récite des prières de circonstance. À certains endroits, on bénit la bûche pendant la messe de minuit et l’on dessine une croix sur le bois.
Tous ces rituels autour de la bûche reposent sur les croyances religieuses. En effet, en faisant brûler la bûche on cherche la protection divine pour l’année à venir. Mais attention, on attribue des vertus protectrices non pas à la bûche, mais plutôt à ses cendres.
En réalité, ce sont les cendres qui protègent la maison contre les intempéries, particulièrement la foudre. Dans un monde à majorité agricole, les cendres peuvent également donner de bonnes récoltes et on les étend généreusement dans les champs.
De plus, pour certains, les cendres de la bûche de Noël protègent la famille contre les pouvoirs maléfiques du diable. Bref, on prête toutes sortes de vertus bénéfiques aux cendres de la bûche de Noël.
La tradition évolue
Dans la première moitié du XIXe siècle, la tradition au Canada français de faire brûler à Noël une bûche dans l’âtre se perd rapidement. Ce n’est pas parce que la foi s’affaiblit, bien au contraire, mais plutôt à cause d’une invention extraordinaire, le poêle à bois qui remplace les foyers. Enfin, la population ne gèle plus durant nos durs et longs hivers puisque les foyers n’arrivaient pas, à cause de notre climat rigoureux, à chauffer convenablement les pièces de la maison. Comme il y a alors de moins en moins de foyers dans les chaumières, on arrête de regarder la bûche de Noël brûlée dans l’âtre.
Cela dit, cette tradition ne disparaît pas totalement, puisque l’on prend l’habitude de remplacer, pendant le temps des Fêtes, la grosse bûche dans le foyer par une petite bûche en bois que l’on met au centre de la table avec des chandelles et parfois de la verdure décorative.
Une pâtisserie
Dans les années 1960 et 1970, on remplace progressivement la bûche de bois par une pâtisserie en forme de bûche que l’on ne cesse d’embellir depuis avec toutes sortes de décorations de Noël et de symboles de l’hiver.
Ainsi, de la lointaine tradition du Moyen-Âge d’alimenter le foyer d’une grosse bûche de Noël pour protéger la maison et assurer de bonnes récoltes, on passe à la délicieuse pâtisserie qui fond dans la bouche. Certes, les puristes vous diront que c’est encore une autre de nos belles traditions qui s’est perdue. En revanche, les amateurs de cette succulente pâtisserie richement décorée pour la période les Fêtes ne s’en plaindront pas, car ils préfèrent de beaucoup la bûche en pâte à celle en bois.
Je profite de cette dernière chronique de l’année, pour vous souhaiter une très belle période des Fêtes et une très bonne année à venir.
Vous aimeriez peut-être...
Voir plus de : Culture
Un nouveau roman pour Marie Paquette : Ma vie au grand jour
L’auteure Marie Paquette est de retour avec son dernier roman, Ma vie au grand jour aux Éditions Marie-Guy.
Un 45e Salon du livre de l’Outaouais qui célèbre la littérature « À Voix Hautes »
Du 22 au 25 février 2024 aura lieu la 45e édition du Salon du livre de l’Outaouais au Palais des …
Montebello accueille un bonhomme carnavalesque connu
En 1954 naissait Bonhomme Carnaval, représentant du festival mythique d’hiver de Québec. Pour son 70e anniversaire, Bonhomme s’est permis une …