Michel Prévost, D.U., président de la Société d’histoire de l’Outaouais
CHRONIQUE | John Egan : le « Napoléon de l’Outaouais »
John Egan s’avère avec Allan Gilmour, que nous avons vu le mois dernier, l’un des plus importants barons du bois de la Vallée-de-la-Gatineau et de l’Outaouais au 19e siècle. Son emprise est si grande dans l’industrie forestière de la région, que le Canadian Merchant’s Magazine le surnomme le « Napoléon de l’Outaouais ».
John Egan est né le 11 novembre 1811, dans le comté de Galway, en Irlande. En 1830, il quitte son pays natal pour le Bas-Canada (Québec), où il occupe le poste de commis de dépôt chez Thomas Durrell, un important marchand dans le haut de la rivière des Outaouais.
Après avoir acquis de l’expérience dans le commerce du bois équarri, Egan se lance à son compte comme marchands de bois. En 1836, il participe à la fondation de l’Ottawa Lumber Association et, l’année suivante, il fonde la John Egan & Co. En 1839, il épouse Anne Margaret Gibson qui lui donnera huit enfants.
Jusqu’au milieu des années 1840, Egan vend surtout du pin rouge, plus rare, mais plus payant que le pin blanc. En 1844, il envoie à Québec deux millions et demi de pieds carrés de bois équarri, dont moins d’un cinquième provient des terres de la couronne, puisqu’une partie vient des petits producteurs de bois et une autre des colons.
L’apogée
Richard Reid note dans le Dictionnaire biographique du Canada qu’au début des années 1850, la John Egan & Co. atteint le sommet de sa prospérité. Ainsi, en 1851, elle emploie 2 000 hommes dans la vallée de l’Outaouais et offre du travail à des centaines de fermiers, qui fournissent à la firme ce qu’elle a besoin, notamment 1 600 bœufs et chevaux.
L’année suivante, les concessions forestières d’Egan s’étendent sur plus de 5 000 kilomètres carrés, ce qui dépasse « celles de quiconque dans l’Outaouais, sauf peut-être celles d’Allan et de James Gilmour. » En 1854, la compagnie d’Egan emploie 3 500 hommes dans une centaine de camps de bûcherons et ses transactions s’élèvent à plus de deux millions de dollars, une somme colossale pour l’époque.
En plus d’être le magnat du bois équarri en Outaouais, Egan devient le premier maire d’Aylmer en 1847. Reid note que pour lui : « les fonctions politiques sont un moyen de promouvoir le bien-être de l’ensemble de la vallée de l’Outaouais et des commerçants de bois en particulier. » Egan se présente aux élections de 1847-1848 dans la circonscription d’Ottawa et il est élu. Réélu sans opposition à l’Assemblée législative, en 1851, il est élu trois ans plus tard dans la nouvelle circonscription de Pontiac.
Egan conserve son siège jusqu’à sa mort, grâce à sa grande popularité et à ses concessions forestières. Toujours selon Reid, « à l’Assemblée, Egan intervint souvent avec passion lorsqu’il s’agissait de la vallée de l’Outaouais, négligée, selon lui, par le gouvernement. »
À l’extérieur de l’Assemblée, Egan joue un rôle notable dans la promotion de plusieurs projets, particulièrement ceux qui favorisent l’industrie forestière.
Revers de fortune
Malgré ses grands succès dans l’industrie du bois et en politique, John Egan connaît plusieurs revers de fortune à la fin de sa vie puisqu’après 1847, le marché du pin rouge décline rapidement. Par exemple, en 1852, les exportations et les prix enregistrent une chute dramatique de 30 pour cent. En 1855, une rumeur affirme qu’Egan a fait faillite. Quoi qu’il en soit, après sa mort à Québec le 11 juillet 1857, sa succession se chiffre à seulement 5 000 livres.
Bien que presque ruiné, ce qui n’est pas rare chez les barons du bois de l’époque, la mémoire de John Egan est toujours vive dans la toponymie de la Vallée-de-la-Gatineau puisqu’un canton, une municipalité, un lac et un ruisseau portent son nom. De plus, il est inventorié au Répertoire du patrimoine culturel du Québec.
Sources
Richard M. Reid, « Egan, John », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , http://www.biographi.ca/fr/bio/egan_john_8F.html, consulté le 26 janv. 2023.
John Egan, Répertoire du patrimoine culturel du Québec, https://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id=9950&type=pge, consulté le 26 janv. 2023.
John Egan, Commission de toponymie du Québec, https://toponymie.gouv.qc.ca/ct/ToposWeb/recherche.aspx?s=Egan, consulté le 2 févr. 2023.
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